vendredi 11 novembre 2011

11 novembre and dusts...

Nous avons en permanence deux étudiants, étudiantes bien souvent, anglais, car ils viennent d'une chouette université avec qui nous avons un partenariat.
Ils signent, je pense, pour faire l'accueil "et plus si affinités".

Aujourd'hui 10 novembre, Faye et Sarah m'ont demandé : "Pourquoi les Français ne portent pas un ... (mimes intensifs)... pour le 11 novembre ?"
Les stagiaires et moi, on se comprend souvent à demi-mots.
Parce que bon parfois, l'accent anglais... Même si l'autre jour je complimentais Matthew, londonien, pour son accent français et qu'il me répondait : "Mais tu sais, nous si on prend l'accent anglais, c'est pour faire semblant... Pour faire comme Jane Birkin, tu vois ?"
En revanche, lorsque James, américain, m'a croisée dans les couloirs et m'a demandé : "ça va ça ? Les fruits ?" Il m'a fallu quelques mètres pour comprendre que c'était une tentative de notre prof de français, Vincent, de lui apprendre l'expression "ça va ? La pêche ?"...
Bref, j'avais compris que Sarah et Faye parlaient du machin que l'on pourrait porter à la boutonnière si nous étions vraiment patriotes. Et d'ailleurs, je suis honteuse de dire que je ne savais pas exactement le nom de ce truc. Instinctivement, j'ai dit "coquelicot" (c'est pas la preuve que je..., non ?)(ou est-ce calicot ? bloody hell...)
Il faut reposer le contexte. Ma collègue (nous sommes deux à tenir le poste d'assistante dans la boîte) est malade depuis lundi (donc absente, donc je gère son poste à sa place), j'ai enterré ma tante mardi après-midi, juste deux semaines après avoir pleuré ma grand'mère, je sors de deux heures de facturation concentrées au point que je ne répondais qu'avec un ricanement de politesse à ma DAF, venue facturer avec moi dans mon bureau et qui clairement avait envie de rigoler un peu (moi aussi normalement, mais là blimmey... j'avais du boulot), et juste au retour de ma blessed pause clope Faye et Sarah me choppent avec cette question...
Je leur ai accordé trente secondes de réflexion, parce que je les aime bien et que j'aime l'échange culturel permanent qu'il y a au rez-de-chaussée de cette boîte. Bref, j'ai commencé par vérifier de quoi elles parlaient : "Pour le 11 novembre vous voulez dire ? Pourquoi on ne porte pas de... (gestes) (oui, j'ai peut-être dit 'coquelicots', mais p*** comment ça s'appelle ?) Eh bien je ne sais pas."
Oui, j'ai eu le courage de l'avouer. Mais devant leurs regards désappointés j'ai continué :
"Il est vrai que nous Français n'arborons (elles ne connaissaient pas le mot. J'ai donc fait des gestes. Juste, imaginez-moi 'arborer' un truc) pas facilement des signes de patriotisme. Nous ne portons pas facilement nos couleurs (idem : petit intermède sur ce que ça veut dire "porter des couleurs") et nous ne mettons pas de drapeaux à nos fenêtres. En revanche, certaines mairies organisent des cérémonies aux monuments aux morts (idem, monuments aux morts n'est pas connu en Angleterre..) où on lit les noms des morts et où on chante La Marseillaise (avec les profs de la chorale de son lycée, ma belle-soeur va le faire, après avoir expurgé, non sans mal, notre hymne de tous ses passages trop "glauques" - je cite).
Je continue, pour l'instruction de nos deux jeunes Anglaises, par leur expliquer que bien souvent c'est l'extrême-droite qui arbore ce genre de signe (quoi ? il faut admettre : vous mettriez un drapeau à votre balcon ?). Et je m'enfuis dans mon bureau.
Moi, fermant la porte, à ma DAF assise à la place de ma collègue (malade, la lâcheuse, mais je l'ai déjà dit) :
"Oh la vache ! (tiens une expression bien française qu'il pourrait être interessant d'essayer d'apprendre à James...) Ya Faye et Sarah qui viennent de me poser une question coton : pourquoi les Français portent pas (gestes) pour le 11 novembre ? "
Ma DAF :
"Portent pas quoi ???"
"Ben tu sais... Un truc bleu-blanc-rouge à la boutonnière !"
'Oh !!!!" fit-elle en réalisation de ce qui m'avait été demandé. "Et tu connaissais la réponse à la question ?" (oui, texto : je suis un peu considérée comme l'intello de ma boîte, avec Vincent, le prof de français pré-cité).
Je répète.
Elle fait une moue dubitative.
Et lorsque ma DAF, Hurrican Roll comme je l'appelle affectueusement, fait une moue dubitative, la pièce change d'ambiance.
"Moi j'en vois, pour le 14 juillet, des Français qui agitent des drapeaux."
J'ai pas eu le temps de retourner voir nos charmantes petites Anglaises pour leur faire part de cela, mais ça me tourne un peu dans la tête :
Pour quoi vous pourriez agiter un bleu-blanc-rouge ? Un 11 novembre ? Un 14 juillet ? Qu'ils crèvent ?
D'accord, mais que faire de tous ceux qui sont crevés pendant ces deux périodes (et trop d'autres)? Comment penser un peu à eux... ?
Et que célébrer, en fait ?
Ça veut dire quoi, être patriote ?