lundi 2 avril 2012

Tout le rugby que j’aime…

C’est le rugby fluide et un peu aérien (pas trop, hein, l’échange de chandelles au bout de quatre ou cinq tours c’est chiant), c’est le rugby des arrières, ces beaux gosses qui traversent la moitié du terrain cheveux au vent quand ils ne sont pas occupés à faire des clins d’Å“il en tribune. Ce sont les demis aussi, petits sales gosses mais rigolos et malins.
Mais ça ne m’empêche pas de goûter avec plaisir, au bureau et à l’heure du déjeuner (je ne crains vraiment rien ni personne) le petit humour sanglant et improbable de la Boucherie Ovalie, leur adulation des « gros » et des tarés de seconde ligne, ainsi que des coups bas dans les rucks (ça va souvent ensemble). 

Le rugby s’est professionnalisé, alors pour moi qui ai encore du mal à admettre qu’un essai transformé maintenant c’est 7 points et que oui, on a le droit de porter le sauteur en touche, de voir ces montagnes bodybuildées, sélectionnées, castées… ça pue un peu la fin du rugby sympatoche. Et les Bouchers (et tant d’autres, mais bon c’est d’eux dont il est question) apportent, paradoxalement, un peu de douceur dans un monde de brutes, un peu d’auto-dérision parmi des mecs qui se prennent de plus en plus trop au sérieux.
J’apprécie leur jolie plume et leur ton sarcastique et noir, digne peut-être d’une certaine presse, morte pour moi lors de la reprise de Charlie par vous-savez-qui. Cette comparaison avec la vieille équipe d’Hara Kiri m’est venue lorsque la Boucherie a lâché sur Twitter, le soir même de la fusillade devant l’école toulousaine, une sale blague bien débile et ultra-noire. C’était peut-être drôle (ou pas, on s’en fout, la question n’est pas là), mais c’était trop tôt, beaucoup trop tôt. Toutes proportions gardées, quand est sorti le « Bal tragique à Colombey : 1 mort », il y a eu au moins les délais de confection, mise en page, impression, distribution… Maintenant sur internet, tout est immédiat. Ce qui me pousse à me demander si l’humour noir peut survivre dans ces conditions, puisque le délai nécessaire à l’émotion et au deuil n’existe plus, ne peut plus être respecté.
Bon et puis voilà : la Boucherie annonce qu’elle se saborde, sous forme de poisson d'avril. Vrai ou pas vrai on s'en fout, encore une fois mon propos n'est pas là. Outre le fait qu’ils ne semblent pas remis de ce « tweet tragique », ils ont l’air lassés d’eux-mêmes et de leur équipe. 3 ans, c’est long, surtout pour une équipe « d’amateurs ». Et puis je comprends aussi, lorsque tu reçois des lettres avec des mots tels que Diffamation, Procédure, Justice… à l’intérieur, tu tires un peu la langue. Une conséquence peut-être, encore, de la professionnalisation, de l’individualisation et la starisation des joueurs…
Pourquoi se casser le dos à rendre hommage à un sport qui, petit à petit, commence à ne plus le mériter ?

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