samedi 31 octobre 2009

Ah le principe de précaution !



Dans la série : les absurdités de la logique, je vous propose aujourd'hui l'interdiction des DVD de La Petite maison dans la prairie aux moins de 18 ans en Finlande...
(lu sur Allociné)

Et non, il n'y a pas de croustillantes scènes coupées (ce qui se passe derrière le tas de bois, dans l'enclos des chèvres, etc.)... Et ce n'est pas non plus la transpiration virile de Charles Ingalls quand il plante un clou qui est en cause...
C'est juste que la série fait neuf saisons, et que la commission de censure finlandaise a eu la flemme de tout se retaper (et comme on les comprend !), et donc ils ont appliqué le principe de précaution et interdit, à tout hasard, les DVD aux moins de 18 ans...

Combien on parie que ça va faire grimper les ventes ?

PS : l'article d'Allociné précise que c'est pour des raisons financières que la commission n'a pas tout visionné... Et mon oeil, il a des contraintes budgétaires ?

mercredi 28 octobre 2009

La terre fait partie de cette identité nationale française

Replaçons un peu le contexte.


l'Appel du 25 Juin 1940

FRANÇAIS !

Je m'adresse aujourd'hui à vous, Français de la Métropole et Français d'outre-mer, pour vous expliquer les motifs des deux armistices conclus, le premier avec l'Allemagne il trois jours, le second avec l'Italie.

Ce qu'il faut d'abord souligner, c'est l'illusion profonde que la France et ses alliés se sont faite sur la véritable force militaire et sur l'efficacité de l'arme économique : liberté des mers, blocus, ressources dont ils pouvaient disposer. Pas plus aujourd'hui qu'hier on ne gagne une guerre uniquement avec de l'or et des matières premières. La victoire dépend des effectifs, du matériel et des conditions de leur emploi. Les événements ont prouvé que l'Allemagne possédait, en mai 1940, dans ce, domaine, une écrasante supériorité à laquelle nous ne pouvions plus opposer, quand la bataille s'est engagée, que des mots d'encouragement et d'espoir.

La bataille des Flandres s'est terminée par la capitulation de l'armée belge en, rase campagne et l'encerclement des divisions 'anglaises et françaises. .'Ces dernières se sont battues bravement. Elles formaient l'élite de notre armée ; malgré leur valeur, elles n'ont pu sauver une partie de leurs effectifs qu'en abandonnant leur matériel.

Une deuxième bataille s'est livrée sur l'Aisne et sur la Somme Pour tenir cette lignée soixante divisions françaises, sans fortifications, presque sans chars, ont lutté contre 150 divisions d'infanterie et Il divisions cuirassées allemandes. L'ennemi, en quelques jours, a rompu notre dispositif, divisé nos troupes en quatre tronçons et envahi la majeure partie du sol français.

La guerre était déjà gagnée virtuellement par l'Allemagne lorsque l'Italie est entrée en campagne, créant contre la France un nouveau front en face duquel notre armée des Alpes a résisté.

L'exode des réfugiés a pris, dès lors, des proportions inouïes. Dix millions (le Français, rejoignant un million et demi de Belges, se sont précipités vers l'arrière de notre front, dans des conditions de désordre et de misères indescriptibles.

A partir du 15 juin, l'ennemi, franchissant la Loire, se répandait a son tour sur le reste de la France.

Devant une telle épreuve, la résistance armée devait cesser. Le Gouvernement était acculé à l'une de ces deux décisions : soit demeurer sur place, soit prendre la mer. Il en a délibéré et s'est résolu à rester en France, pour maintenir l'unité de notre peuple et le représenter en face de l'adversaire. Il a estimé qu'en de telles circonstances, soit devoir était d'obtenir un armistice acceptable, en faisant appel chez l'adversaire au sens de l'honneur et de la raison.

L'armistice est conclu, le combat a pris fin. En ce jour de deuil national, ma pensée va à tous les morts, à tous ceux que la guerre a meurtris dans leurs chairs et dans leurs affections. Leur sacrifice a maintenu haut et pur le drapeau de la France. Qu'ils demeurent dans nos mémoires et dans nos coeurs 1

Les conditions auxquelles nous avons dû souscrire sont sévères.

Une grande partie de notre territoire va être temporairement occupée. Dans tout le nord et dans l'ouest de notre pays, depuis le lac de Genève jusqu'à Tours, puis le long de la côte, de Tours -aux Pyrénées, l'Allemagne tiendra garnison. Nos armées devront être démobilisées. Notre, matériel remis à l'adversaire, nos fortifications rasées, notre flotte désarmée dans nos ports. En Méditerranée, des bases navales seront démilitarisées. Du moins l'honneur est-il sauf. Nul ne fera usage de nos avions et de notre flotte. Nous gardons les unités terrestres et navales nécessaires au maintien de l'ordre dans la métropole et dans nos colonies. Le gouvernement reste libre,' la. France ne sera administrée que par des Français.,

Vous étiez prêts à continuer la lutte, je le savais. La guerre était perdue dans la métropole ; fallait-il la prolonger dans nos colonies ?

Je ne serais pas digne (le rester à votre tête si j'avais accepté de répandre le sang français pour prolonger le rêve de quelques Français mal instruits des conditions de la lutte. Je n'ai pas voulu placer hors du sol de France ni ma Personne, ni mon espoir. Je n'ai pas été moins soucieux de nos colonies que (le la métropole. L'armistice sauvegarde les liens qui l'unissent à elle. La Franc a le droit de compter sur leur loyauté.

C'est vers l'avenir que, désormais, nous devons tourner nos efforts. Un ordre nouveau commence. Vous serez bientôt rendus à vos foyers. Certains auront à le reconstruire.

Vous avez souffert.

Vous souffrirez encore. Beaucoup d'entre vous ne retrouveront pas leur métier ou leur maison. Votre vie sera dure. Ce n'est pas moi qui vous bernerai par des paroles trompeuses. Je hais les mensonges qui vous ont fait tant de mal. La terre, elle, ne ment pas. Elle demeure votre recours. Elle est la patrie elle-même. Un champ qui tombe en friche, c'est Une portion de France qui meurt. Une jachère de nouveau emblavée, c'est une portion de France qui renaît. N'espérez pas trop de l'Etat qui ne peut donner que ce qu'il reçoit. Comptez pour le présent sur vous-mêmes et, pour l'avenir, -sur les enfants que vous aurez élevés dans le sentiment du devoir.

Nous avons à restaurer la France. Montrez-la au monde qui l'observe, à l'adversaire qui l'occupe, dans tout son calme, tout son labeur et toute sa dignité. Notre défaite est venue de nos relâchements. L'esprit de jouissance détruit ce que l'esprit de sacrifice a édifié. C'est à un redressement intellectuel et moral que, d'abord, je vous convie. Français, vous l'accomplirez et vous verrez, je le jure, une France neuve surgir de votre ferveur.



J'espère que vous aurez noté le joli "Du moins l'honneur est-il sauf". L'histoire a ses perdants, parfois...
Alors non, le Maréchal Pétain n'a pas le monopole de l'appel à la terre. Ce n'est pas parce qu'un jour il a prononcé ces mots que l'idée doit être à tout jamais frappée d'opprobre.
D'ailleurs à ce compte-là, les anars sont pétainistes également, voir l'avant-dernière strophe : ne comptez pas trop sur l'Etat, etc.
C'est juste que parfois, il faut savoir manier l'histoire nationale avec un peu de doigté. Et du doigté, j'en vois pas beaucoup en ce moment. Pour être tout à fait franche, je trouve que ça pue.
Déjà cette histoire de questionnaire à remplir pour avoir la nationalité française... ça me fait penser à ça :




Si vous voulez approfondir, j'ai trouvé le texte du discours sur "marechal-petain.com" (! c'est tellement incongu ! J'adore internet...)

PS : Kaamelott saison 6 passe en ce moment sur la sixième chaîne. Et puis sur le site internet M6 replay pour ceusses qu'ont pas la télé. Et curieusement, ya des échos...
La romanisation de la Bretagne, et Leodagan qui s'inquiète un peu au moment de signer :

"La romanisation, c'est quoi exactement ? Enfin, je sais pas moi... Après c'est peut-être juste le mot qui fait que ça pue."

C'est exactement cette question que j'aurais envie de poser à Hortefeux et consorts.
(remplacer romanisation par identité nationale, of course.)

dimanche 25 octobre 2009

Le Club des Cinq sur les pas des Montreurs d'Ours : Chapitre 7

Chapitre VII : Claude passe à l'action

Résumé des épisodes précédents : Persuadés d'avoir localisé les contrebandiers (protégés par une redoutable meute de chiens qui bavent), les Cinq tentent de jouer la carte gendarmes. Ils se sont faits proprement humilier.


Ce fut paradoxalement à la suite de cette déprimante tentative que tout s'accéléra. Couchée dans la petite chambre qu'elle partageait avec sa cousine, Dagobert sur ses pieds, Claude fixait le plafond. Elle écoutait la respiration calme d'Annie mais ne parvenait pas à trouver le sommeil. Son fidèle chien ne dormait pas non plus, évidemment. Dans sa tête tournaient des images, des pensées... Et l'inaction la rongeait... Cette visite aux gendarmes lui ressemblait si peu : Claude était une fillette décidée et irréfléchie, et elle avait une réputation à tenir ! Alors elle prit comme de juste une décision irréfléchie et élabora en quelques secondes un plan extrêmement dangereux et totalement inutile.

Aussi silencieuse et discrète que Mick qui se faufile dans la cuisine pour une fringale nocturne, elle se lève, s'habille et se dirige vers la salle de bains, un Dagobert étonné sur ses talons. D'un geste, elle intime l'ordre à son chien de ne pas faire de bruit. Dans l'armoire à pharmacie, elle trouve ce qu'elle était venue y chercher : la boîte de somnifères tranquillisants surpuissants que son père emportait toujours lorsqu'il partait en vacances avec sa fille et ses neveux. Elle la glissa dans la poche de son pantalon puis descendit sur la pointe des pieds à la cuisine. Quelques minutes plus tard, sa silhouette sombre et souple émergea de la fenêtre et sauta dans le jardin. Le fidèle Dagobert, bien qu'excité par cette promenade inattendue, ne poussa pas un jappement lorsqu'il la suivit sur la route de Lanes...

Au gîte pourtant, quelqu'un d'autre ne dormait pas. François, totalement remis de l'humiliation de sa visite aux gendarmes, s'était brusquement souvenu qu'il n'avait pas fait son exercice du jour dans son cahier de vacances. Il alluma donc la lampe de poche sous ses couvertures. C'est le devoir accompli, lorsqu'il se recoucha, qu'il entendit Claude marcher dans le couloir. Elle aussi avait du mal à dormir, songea-t-il. Avec tous ces événements, aucun d'entre eux n'avaient eu le temps de faire leurs devoirs quotidiens, certainement que sa cousine était allée travailler dans la salle de bains pour ne pas réveiller Annie... Un bon quart d'heure plus tard, n'entendant pas sa cousine revenir dans sa chambre, François commença à avoir des doutes... Et si Claude peinait – comme d'habitude – sur ses mathématiques ? Le jeune homme suivant une classe supérieure à la sienne, il se sentait comme un devoir d'aller aider sa cousine à finir ses devoirs, pour qu'elle puisse enfin dormir comme lui du sommeil du juste. Il se dirigea alors vers la salle de bains, où il ne trouva personne. Descendant les escaliers, il explora alors la cuisine. La fenêtre était ouverte, il la referma consciencieusement, en se promettant de parler dès le lendemain à son oncle des négligences de sa cuisinière. Il avait beau adorer Maria, on ne badine pas avec les questions de sécurité. Et il alla se recoucher, s'endormant comme un bienheureux avec le sentiment du devoir accompli. En oubliant complètement Claude au passage, qui allait bientôt se trouver en grand danger...

Celle-ci, pendant ce temps, marchait aussi vite que la pente le lui permettait. Elle avait le cœur qui battait vite – à cause de l'effort physique, voulait-elle croire. Mais elle avait quitté le village depuis longtemps, et les arbres autour du sentier se faisaient de plus en plus noirs et menaçants. Dagobert, qui n'avait aucun mal à suivre sa maîtresse, pointait le museau et les oreilles dans toutes les directions, grognant de temps en temps. « Ce sont les bruits de la nuit qui l'inquiètent » pensa Claude. « Il n'est pas habitué à la montagne. » Elle non plus, d'ailleurs... Malgré elle, la courageuse petite fille ne pouvait s'empêcher de penser à toutes les histoires que leur avait raconté Jean, le fils du montreur... d'ours... Et à celles d'Albert, le père des éleveurs quand ils l'avaient rencontré à Fraguet... Elle força ses jambes à accélérer le rythme, pour sortir au plus tôt de ces bois. Elle regrettait la mer...

Arrivée au champ de myrtilles, elle s'accorda une pause, pour souffler un peu. Elle sortit alors de sa poche la boîte de médicaments de son père et les restes des petits gâteaux à la viande que Maria leur avait servis au dîner et qu'elle avait pris soin de prendre dans le frigo avant de quitter la cuisine, sans même une pensée coupable pour Mick qui allait certainement se faire passer un savon d'anthologie pour ce larcin alors qu'il était, pour cette fois, complètement innocent. Elle fourra rageusement une bonne dizaine des petits comprimés dans chaque gâteau. « Si avec ça ils osent encore me montrer les crocs, ces dangers publics... » Chaque gâteau aurait endormi un éléphant. Elle soupira et se tourna vers Dagobert :

- Qu'est-ce que je suis en train de faire, mon vieux Dag ? murmura-t-elle.

L'intelligent animal ne la quittait pas des yeux, semblant réellement comprendre ses paroles.

- Dans quel pétrin inutile me fourre-je encore ? ajouta-t-elle non sans raison, pensant à ses précédentes aventures...

Mais il était trop tard pour reculer, et Claude était de surcroît bien trop fière pour cela. En soupirant derechef, et maudissant son caractère qui la poussait à prendre toujours plus de risques, elle se remit en route, un Dagobert toujours inquiet et silencieux sur ses talons. Elle n'eut aucun mal à se repérer, par cette nuit sans nuages. Elle regrettait d'ailleurs de ne pas avoir pris un deuxième chandail, car le fond de l'air était frais, et maintenant qu'elle avançait plus précautionneusement, la brise qui séchait la sueur de ses vêtements la glaçait jusqu'à l'os. A l'ubac (1), une chouette poussa un hululement sinistre...

Parvenue au piton rocheux derrière lequel il fallait tourner, elle avança encore plus lentement, si c'était possible. Elle faisait particulièrement attention à ne pas glisser sur les cailloux du sentier. Ce n'était pas le moment de se fouler une cheville. Un bruissement soudain, à quelques mètres d'elle, la fit sursauter et elle faillit en perdre l'équilibre. Heureusement, elle se rétablit et se réprimanda intérieurement de son accès de froussardise. Jamais elle ne racontera à quelqu'un qu'elle avait si peur ! Elle était l'intrépide Claude Dorsel, oui ou non ? La main sur le collier de Dagobert, elle essayait de faire abstraction de tous les bruits de la nuit. Et enfin, ce qu'elle attendait arriva. Les poils de son chien se dressaient sous son collier. Presque instantanément, les aboiements qui les avaient tant effrayés, elle et ses cousins, en plein jour, retentirent avec une force décuplée dans le relatif silence nocturne de la montagne. En espérant qu'il y aurait assez de gâteaux pour tous ces molosses, elle lança ces derniers dans la direction approximative du bruit et redescendit le plus vite possible en direction du piton rocheux, qui semblait comme la limite tacite du territoire que les cerbères gardaient. Le vacarme des aboiements cessèrent en effet peu après. Les chiens s'étaient-ils endormis ? Avaient-ils réveillé leurs maîtres ? Claude frissonna à l'idée de ce que l'homme ténébreux pourrait faire à une enfant qu'il trouverait fouinant dans son repère au beau milieu de la nuit. Bah ! il lui suffisait d'être discrète et de ne pas se faire prendre, voilà tout ! Elle attendit encore une quinzaine de minutes, puis se décida à reprendre l'ascension, la main toujours sur l'échine de son chien. Mais arrivés à l'endroit fatidique, il semblait qu'elle put continuer sans ennuis. Dagobert restait calme.

La voie des contrebandiers était enfin libre.

Claude se permit alors un sourire, le premier depuis que la jeune intrépide était sortie de son lit. Ça y était ! C'était l'aventure, et elle y était jusqu'au cou ! En renversant la tête en arrière pour respirer silencieusement l'air de la nuit, elle se fit la réflexion soudaine qu'elle s'était ennuyée à mourir depuis le début de ces vacances. A l'instant, entre des chiens monstrueux (peut-être) endormis et un nombre indéterminé d'hommes patibulaires (sûrement) armés... elle se sentait bien. Tout simplement.

Tous ses sens en éveil (sauf le bon – le bon sens...), elle continua le semblant de chemin, Dagobert imitant par habitude tous ses mouvements. En étant le chien du Club des Cinq, c'était devenu une sorte de réflexe. Ils l'avaient entraîné dans tellement de situations invraisemblables auxquelles il n'avait jamais compris grand'chose !... Il n'avait peut-être pas de pedigree, mais il lui a fallu très peu de temps pour comprendre quand se taire et quand attaquer. Sa maîtresse lui avait posé la main sur l'échine en disant « Chut... » Et l'intelligent animal avait immédiatement adopté lui aussi une démarche de Sioux.

Au bout de quelques minutes de montée, Claude aperçut ce qui semblait être, dans la pénombre, l'entrée d'une caverne. Mais bien entendu ! Les anciens chemins de la Résistance passaient sous la montagne ! C'est pour cela qu'ils sont presque indétectables. Il suffisait de bien camoufler l'entrée et la sortie. Et hop, encore un mystère de résolu au crédit du Club des Cinq ! Mais la fillette se figea très vite dans son autocongratulation... Dans le silence de la nuit, des voix lui parvenaient de l'intérieur de la montagne. Elle se rapprocha de l'entrée de la caverne, et se camoufla tranquillement derrière un rocher pour écouter la conversation. Elle était à peine à quelques mètres des sinistres hors-la-loi.

- Bon, je crois qu'on a tout reçu, non ?

La voix était rude, profonde et bourrue. Celle qui lui répondit était plus nasillarde, mais contenait tellement de méchanceté qu'elle faisait froid dans le dos :

- Oui, la livraison de ce soir était la dernière avant le mois prochain. Il ne reste plus qu'à redescendre les sacs jusqu'à Foix...

Claude frémissait de bonheur. A quelques pas d'elle, il y avait et les contrebandiers, et la marchandise de contrebande. Quel beau coup de filet ! Si seulement elle avait quelque chose pour les arrêter, ici, maintenant... une escouade de gendarmes, ou bien une paire de menottes, ou à la rigueur un plan d'action ! Mais elle n'avait rien de tout ça. Rien du tout. Elle avait Dagobert. Faisant totalement confiance en son chien, la fillette s'élança bravement hors de sa cachette en criant :

- Vous êtes faits, mes gaillards !

Il faut lui accorder qu'elle récolta au moins deux secondes de stupeur, à mettre sur le compte de l'effet de surprise. Les deux hommes la regardaient, les yeux écarquillés. L'un était le grand basané, celui qu'elle avait déjà croisé à Lanes. Il sembla la reconnaître également :

- Qu'est-ce que tu fiches ici ??

Ah c'était à lui qu'appartenait la voix profonde et bourrue, nota tranquillement Claude dans son mémo personnel. L'autre devait alors être le pervers nasillard... Elle se tourna vers lui pour le détailler plus à son aise. Petit, blond, un air méchant sur le visage, il avait un genre de bec-de-lièvre et des cheveux filasses. Il était vraiment laid. Et ça ne s'arrangea pas lorsqu'il éclata de rire, découvrant des dents jaunes mal plantées :

- Un petit garçon et un chien ! C'est ça, la police moderne ?!

Il l'avait prise pour un garçon. Claude se rengorgeait. Elle adorait quand les gens se méprenaient sur ce point :

- Dag, je m'occupe de lui, maîtrise l'autre !

Du coin de l'œil, il lui sembla voir Dagobert qui hésitait, l'air interdit, tandis qu'elle s'avançait résolument vers le petit contrebandier blond qui l'attendait, un sourire en coin. Elle lui porta un coup décidé à l'estomac. Il eut la politesse de faire semblant de se plier en deux. Ou peut-être était-ce pour mieux saisir Claude à bras-le-corps et la percher négligemment sur son épaule. Il interpella son collègue :

- Hé ! Il est passé où, le sale cabot ?

L'autre lui répondit en haussant les épaules :

- J'en sais rien, il a filé sans demander son reste. On fait quoi du gamin ?

- Bonne question. Je vais ligoter là-derrière pour le moment. Peut-être que les Espagnols seront intéressés ? Ça pourrait être une monnaie d'échange intéressante pour un sac de clopes ou deux en plus...

- Mmm... On sait jamais, tu as raison, garde-le au frais. Je vais voir ce qui est arrivé à mes chiens.

Claude se débattait tant et plus, mais l'homme, en dépit de sa petite taille et de ses cheveux filasses, était rudement fort. Il l'emmena facilement dans un recoin de la caverne et la jeta sans ménagements sur le sol. Il déroula un bout de ficelle d'autour de sa taille.

- Alors, petit ! On est plus très bavard soudainement... C'est dommage, tu m'as bien fait rire, tout à l'heure ! Tu veux pas me la refaire, là : « Vous êtes faits ! ». Ah c'était vraiment bon...

Tout en ligotant solidement les mains et les pieds de Claude qui gardait obstinément les lèvres serrées et le regard fixe, il continuait son monologue :

- Dans mon métier c'est pas souvent l'occasion de rigoler, vraiment. Et tu as pu voir que mon copain Manuel Ibanez là, c'est pas exactement un boute-en-train. Oui, même s'il est français, il a des origines espagnoles.

Claude commençait à jubiler intérieurement, bien qu'elle s'appliquât à n'en rien laisser paraître. Le méchant était bavard. Les méchants sont toujours trop bavards...

- Ça doit être de là qu'il tient cette sévérité. J'ai vu sa famille, de Badalona, à côté de Barcelone. Ce sont eux qui nous fournissent une fois par mois toujours à la même date – c'était hier – alors forcément, parfois on se croise. Eh bah j'ai jamais vu une collection pareille de pierres tombales !

La fillette s'appliquait à bien tout retenir. Après il n'y aura plus qu'à sortir de cette caverne et courir prévenir les autorités pour qu'ils démantèlent tout le réseau ! Parfois, l'aventure, c'est presque trop facile, se dit Claude, ficelée comme un saucisson par un contrebandier prêt à tout sur le sol d'une caverne humide dont personne ne connaissait l'emplacement au sommet inaccessible d'une montagne rocheuse, en plein milieu de la nuit, seule et personne ne sachant où elle était exactement. Les bandits sont trop bêtes, c'en est presque dommage. Franchement.

- Alors moi j'essaie de garder la joie de vivre, tu vois petit ? Je me dis : « André Dubois ! Ne te laisse pas gagner par la morosité ambiante ! Pense plutôt aux fêtes de Pamiers, ta ville natale où tu habites encore aujourd'hui, et souris ! Souris, André Dubois ! »...

Il avait fini de ligoter Claude. Cette dernière testa la solidité de ses liens. Elle avait déjà été attachée des dizaines de fois au cours de leurs aventures, alors elle pouvait dire que le drôle savait y faire. Les liens étaient parfaitement serrés, parole d'experte.

Et pendant ce temps, sur la route qui descendait vers le village, le brave Dagobert courait, courait à perdre haleine...


(1) Versant orienté nord de la montagne. L'adret : versant orienté sud.

dimanche 18 octobre 2009

Le Club des Cinq sur les pas des Montreurs d'Ours : Chapitre 6

Résumé des épisodes précédents :

Dagobert est passé à un poil de la mort - au moins. Les méchants sont vraiment patibulaires, et pour le reste, les Cinq sont fidèles à eux-mêmes.

Ce chapitre est un peu long, profitez-en le suivant est tellement barbant que j'ai du mal à l'écrire...


Chapitre VI : Première visite aux gendarmes

Mick aurait bien remplacé le pain et la confiture, ce matin-là, par un reste même minuscule de la tarte aux myrtilles que Maria leur avait servie la veille au soir. Une tarte tellement savoureuse qu'elle était déjà légendaire. François, qui partageait la même chambre que son cousin, lui assurait d'ailleurs qu'il en avait parlé en dormant. Hélas il ne restait plus rien de l'incroyable dessert, pas même des miettes – Dagobert s'était occupé du plat que l'ingénieuse Claude était parvenue à glisser sous la table sous le nez de son père. Mick touillait alors nostalgiquement son café au lait. Mais heureusement pour le jeune homme, sa cousine semblait en apparence très intéressée par renouveler leur après-midi passée à cueillir des myrtilles. Elle faisait de visibles efforts pour mettre le sujet sur le tapis en discutant de manière anodine avec ses parents. Tante Cécile voulait les emmener passer la journée au bord de l'étang de Bethmale, et avait l'air de penser que son idée était excellente. Elle savait par expérience que ces enfants avaient une extraordinaire capacité à se mettre dans des situations impossibles lorsqu'ils étaient livrés à eux-mêmes. Et elle était décidée à passer des vacances tranquilles. Remarquant enfin le manège, Mick se mit alors à abonder dans le sens de sa cousine, même s'il avait bien compris que les raisons pour lesquelles elle s'intéressait à Lanes étaient bien éloignées de ses préoccupations alimentaires. Annie, en revanche, semblait ne rien comprendre du tout :

- Oh non ! Claude, la tarte était délicieuse, certes mais...

- Enfin, pour ce qu'on a réussi à en sauver de la voracité de Mick... la coupa François.

Annie sourit et reprit avec sagesse :

- Mais on ne peut en manger tous les jours, au risque de se lasser. Et de prendre du poids, ajouta-t-elle par-devers elle.

Claude manqua s'étrangler avec son café au lait. Trois quarts d'heure de manipulations habiles de la conversation réduits à néant ! Madame Dorsel approuva les propos de sa nièce. Alors que la situation apparaissait désespérée et la morne journée au lac sous la surveillance étroite des deux adultes inéluctable, Claude et Mick reçurent coup sur coup deux soutiens inattendus. Henri Dorsel, tout d'abord, qui avait retenu de cette histoire de myrtilles qu'elles étaient sur la montagne, loin, très loin, et que les cueillir prendrait aux enfants une bonne partie de la journée – une journée où ils ne seraient pas dans ses pattes, donc... Et le petit Jean, le fils du montreur d'ours, qui apparut soudain à la fenêtre de la cuisine :

- Bonjour ! Monsieur, Madame... Salut Annie ! Et les autres, aussi...

Après des débuts difficiles, la blonde fillette était visiblement devenue sa préférée. Sans gène, le jeune montagnard escalada la fenêtre et s'assit très simplement à table avec les autres. Oncle Henri fronça les sourcils, semblant réfléchir en fixant le garçon :

- Celui-là Cécile, je jurerais qu'il n'est pas à nous, même s'il en a les manières...

Sa femme soupira :

- C'est le fils du montreur d'ours... tu sais, celui qu'on a vu à Massat...

- C'est vrai que sans Miel, on pourrait presque te confondre, lui sourit François qui aurait reconnu le petit sauvage dans un bal masqué au milieu d'une centaine de personnes.

Tout en recouvrant une large tranche de pain grillé d'une quantité proprement phénoménale de confiture, Jean proposa :

- Je sais que la propriétaire du gîte a mis des vélos à votre disposition... S'il y en a un pour moi, on pourrait peut-être aller faire un tour à Saint-Girons...

Le garçon surprit le regard inquiet de Tante Cécile :

- Je connais tous les chemins faciles et où il n'y a pas de circulation, ajouta-t-il très vite. Je vous montrerai !

Cécile Dorsel eut une moue dubitative. Jean se sentait à court d'arguments :

- Et on pourra aller voir le musée de la Résistance, jeta-t-il pour finir, en désespoir de cause, le ton presque implorant.

François lança alors son avis d'aîné dans la bataille :

- En voilà une bonne idée, Jean ! Oncle Henri, tu sais comme moi que ces montagnes ont abrité beaucoup de résistants à l'occupant allemand... On va pouvoir apprendre plein de choses passionnantes ! Et au retour au pensionnat en septembre, je suis sûr que nous serons en avance sur le programme d'histoire. Tante Cécile, dit oui !

Claude et Mick se regardèrent en camouflant leur grimace derrière leur tartine de confiture. Bah... après tout... si c'est le prix à payer pour passer une journée loin du gîte et des adultes...

Tante Cécile accepta, au soulagement de son mari qui s'installa d'un bond dans le fauteuil et déplia le journal local du jour. Les enfants pressèrent alors Maria de leur préparer un pique-nique. Le temps qu'ils sortent cinq vélos de la remise et vérifient leur état général – ils étaient impeccables et parfaitement gonflés – la diligente cuisinière ressortit avec un panier dont le poids était porteur de bien des promesses...

Ils se mirent en route, en pédalant gaiement en file indienne derrière Jean qui ne s'était pas vanté : il les fit effectivement passer par de petits chemins peu fréquentés, à côté de la départementale qui descendait la vallée jusqu'à la ville, Saint-Girons. Les Cinq découvrirent de multiples petits hameaux, bâtis sur des soulanes que l'on ne voyait pas de la route. Le fils du montreur d'ours, très fier, les nommait les uns après les autres. Annie, qui avait un sens de la musique prononcé, rêvassait en écoutant ces noms de lieux qui, avec l'accent du pays, coulaient harmonieusement à ses oreilles. Dagobert était en pleine forme et sautait de ci, de là. Lui aussi préférait les chemins à la route !

Lorsqu'ils arrivèrent enfin en vue de Saint-Girons les quatre enfants poussèrent un cri d'admiration qui remplit le petit Jean de fierté pour son pays natal. La ville, typiquement ariégeoise, avait été bâtie au confluent du Lez et du Salat, et la plupart de ses maisons surplombait les deux fleuves. Claude et Mick se déclarèrent conquis et après avoir solidement attaché les vélos, ils insistèrent pour explorer la ville de fond en comble. En dépit de l'enthousiasme qu'ils y mirent, ils ne purent détourner François de leur but premier. Au bout d'une heure, celui-ci prit sa petite sœur par le coude et les entraîna d'un pas décidé vers le Musée de la Résistance.

Dès l'entrée du musée, Claude prit son air furieux des plus mauvais jours : les chiens n'étaient pas admis à l'intérieur ! lui indiqua d'un air revêche la préposée au guichet. Elle faillit rester bouder dehors avec Dagobert, mais ce qu'elle découvrit à l'intérieur lui donna matière à penser, et elle en oublia sa mauvaise humeur...

Un peu plus tard, assis à la terrasse d'un café traditionnel qui avait pour nom le Picou, les cinq enfants savouraient les glaces qu'ils avaient commandées. C'est alors que Claude aborda le sujet auquel elle n'avait cessé de penser :

- Vous avez vu ? demanda-t-elle sans plus d'explications, d'un air de conspiratrice.

Ses cousins et le petit Jean se regardèrent, ne comprenant pas de quoi elle parlait.

- Les chemins ! Les chemins que les brigadistes et les résistants empruntaient pour passer la frontière !

Les autres saisirent enfin où elle voulait en venir, sauf Jean qui suçotait sa cuillère d'un air ahuri.

- Tu crois qu'ils existent encore ? demanda lentement François.

- Bien sûr ! Et je mettrais la patte de Dag à couper que ce sont les mêmes que les contrebandiers empruntent encore aujourd'hui pour leur trafic !

Entendant son nom, le chien qui était couché sous la table poussa un bref jappement. Péremptoire, Claude affirma :

- Dag est d'accord avec moi ! Il n'y a plus qu'à les retrouver, ces chemins, et nous mettrons la main sur les bandits !

- « Il n'y a plus qu'à » grommela Mick dans une très mauvais imitation du ton surexcité de sa cousine.

- Claude, commença François d'une voix raisonnable, ces passages ont disparu depuis longtemps parmi les éboulements, nous n'avons aucune chance de tomber sur eux, même en cherchant pendant tout le reste des vacances !

C'est alors que Jean intervint. Il avait déjà fini sa glace au caramel et louchait sur celle d'Annie, qu'elle avait arrêté de savourer, prise par la conversation.

- Bien sûr que non, ils n'ont pas disparu. Ces chemins, c'est du solide, croyez-moi.

- Mais qu'est-ce que tu en sais, toi ? demanda Mick que la suffisance du garçon énervait parfois.

Ce dernier lui répliqua vertement :

- J'en sais que les connais, ces chemins, moi !

Les Cinq – même Dagobert, intrigué par le silence soudain – le regardèrent fixement. Claude se saisit de la glace d'Annie qu'elle poussa devant le garçon, un air obséquieux sur le visage :

- Et... tu pourrais nous en dire plus ?

- Ben... C'est quand on cherche les ours, avec Papa... Je ne peux pas trop vous expliquer, mais en revanche...

- Tu peux nous montrer ! finirent de concert Claude et Mick.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Annie a bien protesté un peu à l'idée de grimper tout là-haut après cette déjà longue randonnée en vélo, mais même François était enthousiasmé à l'idée de retrouver ces traces de l'Histoire. Le retour dans la vallée d'Ercé s'effectua rapidement d'une pédale ferme et décidée. La petite fille avait du mal à suivre.

Ils déjeunèrent au pied de la montagne maintenant familière et, pour le plus grand bonheur de Mick, ils eurent des myrtilles chaudes et fraîchement cueillies pour dessert. Les parts de gâteau au chocolat que Maria avait prévues furent précautionneusement mises de côté pour le goûter par Annie. Tandis qu'elle rangeait ce trésor dans le panier, elle eut pour Mick et Dagobert le regard d'une chatte qui couve ses petits... Ce qui les dissuada de réclamer un deuxième dessert ! Claude et François riaient à gorge déployée de la similitude de regard entre le garçon et le chien à ce moment précis.

Mais lorsqu'ils reprirent l'ascension, ayant laissé les vélos à l'ombre de l'arbre où ils avaient pique-niqué, et l'impressionnant sommet rocheux s'approchant, les conversations se firent moins enjouées. Même Claude avait le cœur qui se serrait. Elle se souvenait de leur rencontre avec l'homme menaçant, à ce même endroit, et elle ne quittait pas son chien des yeux. Seul Jean semblait serein. Au moment où les buissons de myrtilles se faisaient plus rares sur la terre caillouteuse, il vira brusquement en direction du piton rocheux que les cousins avaient déjà repéré. Seulement, le petit montagnard n'en fit pas le tour. Il passa devant et continua comme si de rien n'était. Il semblait ne suivre aucun chemin, mais être sûr de lui. Le terrain devenait de moins en moins praticable, et François dut lui demander de ralentir, car Annie peinait à le suivre. Bientôt, même Claude fut perdue. Tenant fermement Dagobert par son collier, elle n'avait aucune idée d'où ils allaient et comment ils étaient arrivés là. Soudain, un grognement de son chien la fit s'arrêter. Elle appela les autres à mi-voix. Sous sa main, le poil de l'échine de la brave bête se dressait et son flair ne l'avait jamais trompé. Il y avait du danger...

Les enfants n'eurent pas le temps de se demander ce qu'il se passait ou que faire. Soudainement, ils virent débouler à cent mètres d'eux six énormes molosses, qui montraient les crocs et bavaient abondamment. Les monstres se précipitaient vers eux, dans un ensemble impressionnant, ne laissant aucun doute sur leurs intentions : ils voulaient les dévorer vivants.

- Les chiens de l'enfer ! glapit Annie.

Pleins de réflexes, Mick et François l'attrapèrent chacun par un bras et se mirent à dévaler la pente. Rapidement, Jean les dépassa pour les guider. Claude était restée un peu en arrière, car Dago faisait mine de vouloir protéger la fuite des enfants et elle devait le tirer par son collier. Mais bientôt elle appela ses cousins. Sans s'arrêter de courir, Mick tourna la tête. Cela représentait une jolie performance qu'il n'eut pas l'heur de poursuivre car il stoppa brusquement lui aussi. Annie faillit être écartelée entre ses deux frères, François ayant continué à toute allure. Elle se retourna à son tour. Les chiens s'étaient arrêtés. Visiblement, ils protégeaient quelque chose des intrus dont ils ne voulaient pas s'éloigner. De leur poste d'observation un peu en hauteur, ils observaient les enfants en grognant, mais ne faisaient plus mine de vouloir les courser. Prudemment, les enfants continuèrent tout de même leur descente, à un rythme plus sûr. Claude était restée un peu en arrière, regardant autour d'elle comme si elle voulait graver le paysage dans sa mémoire.

Ce ne fut qu'arrivés aux premiers buissons de myrtilles que les enfants retrouvèrent l'usage de la parole. Ce fut Claude qui brisa le silence :

- Vous l'avez vu, vous aussi ?

- Vu quoi ? grogna Mick. A part les crocs de ces fauves, je n'ai rien vu de particulier, moi. Ah si ! la bave qui se répandait sur leurs babines retroussées lorsqu'ils regardaient nos tendres mollets...

François renchérit :

- Je suis sûr que cette race de chiens est interdite en France ! Ils sont bien trop...

- L'homme ! le coupa Claude qui n'avait jamais été très intéressée par la notion de loi ou d'interdiction. L'homme basané de l'autre jour ! Quand les chiens nous ont couru après, j'ai vu sa tête qui dépassait du rocher !

- Et il n'a pas essayé de rappeler ses chiens ? s'indigna Annie. Ils auraient pu nous dévorer !

- Mais enfin, Annie ! s'exaspéra Claude, c'est un des contrebandiers ! La vie n'a que peu de valeur pour ces gens-là (1), ajouta-t-elle, très sérieuse.

François réfléchissait :

- Je crois que tu as raison, Claude. Et cette histoire devient trop grave pour qu'on puisse la garder pour nous. Jean ? Peux-tu nous conduire à la gendarmerie d'Oust ?

Encore tremblants de leur mésaventure, les enfants reprirent leurs vélos et arrivèrent bientôt en vue de la gendarmerie, qui était située dans le village voisin. Réagissant à un vieil atavisme des gens du lieu, Jean battit en retraite et les laissa y aller seuls, prétextant l'heure tardive, et que son père allait s'inquiéter, et qu'il avait beaucoup de choses à faire, et que Miel devait être en train de mourir de faim, etc. Ce fut donc le Club des Cinq dans sa composition originelle qui frappa à la porte de la gendarmerie. Qui était fermée. Un vieil homme qui prenait le soleil sur le pas de sa porte à quelques pas leur indiqua une direction du geste, en marmonnant quelques phrases en patois. Se tournant vers l'endroit indiqué, les quatre enfants découvrirent un petit café, à la terrasse duquel étaient fermement installées les forces de l'ordre du canton du Couseran.

François s'avança, et entreprit de raconter leur mésaventure. Cependant, l'air sceptique des hommes en uniforme lui fit petit à petit perdre son assurance. Lorsqu'il en vint à leur conclusion, ils se trouva lui-même ridicule d'annoncer qu'ils avaient découvert le lieu par où les cigarettes de contrebande passaient en France depuis des années, au nez et à la barbe des douaniers. Il baissa la tête vers ses chaussures, piteux. Mais le brigadier avait un bon cœur – surtout après l'apéro. Il tapota donc l'épaule du garçon en lui expliquant que les Ariégeois n'avaient pas pour habitude d'attacher leurs chiens et que donc il n'était pas rare de se faire aboyer dessus en promenade. Puis il se tourna vers le patron pour offrir la tournée. Dépitée, Claude refusa dignement, et entraîna ses cousins avec elle en direction du gîte. Le soir tombait, ils n'avaient pas mangé le goûter, et ils se sentaient déprimés. Le repas fut particulièrement calme. François accepta à peine de parler à son oncle de leur visite au musée. Les Cinq furent longs à s'endormir cette nuit-là.


(1) Magnifique réplique prononcée par Brad dans le « Rocky Horror Picture Show ».

jeudi 15 octobre 2009

La pensée whedonesque du jour...

Entre deux pages jaunies, une petite phrase me titille et m'empêche de m'intéresser à l'évolution du débat sur la fonction sociale de l'enseignement supérieur après 1968...

"If you take sexual advantage of her, you're going to burn in a very special level of hell. A level they reserve for child molesters and people who talk at the theater."

C'est issu de Firefly, série méconnue bien à tort crée par Joss Whedon. Le shepherd (un genre de pasteur ?) Book menace un pauvre Capitain Mal' aux prises avec une adorable ingénue qui s'avérera très vite être une belle salope...

Saffron est un personnage hilarant de femme forte (entendez : "de tête" bien que, je vous l'accorde, ses arguments sont particulièrement frappants aussi !) qui est à l'origine des deux-trois meilleurs épisodes de la série, à mon humble avis...

En même temps, à la place du Shepherd je m'inquiéterais également. Tout d'abord parce que Saffron n'est pas plus ingénue que toi ou moi, loin de là. Mais aussi parce que sur presque toutes les photos officielles de la série, Nathan Fillon semble avoir du mal à contenir son excitation... (Et on ne me fera pas croire que ce sont les costumes ! J'ai un fantasme à cultiver, moi...)



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J'essaierai bien de me rappeler combien les Chinois ont de types d'Enfer différents, mais je dois retourner bosser. Démon de la thèse, quand tu nous tiens...


Et non, je ne saute pas du coq à l'âne, car Firefly est un WESTERN INTERGALACTIQUE et je suis sûre que l'idée a dû plaire à Carpenter, d'ailleurs il en est certainement à moitié mort de jalousie parce que ça fait bien longtemps que j'attends de ses nouvelles. En plus, la série a eu à peu près le même succès que ses films, alors...

Allez, juste pour le plaisir, Grosmoche (ou Groslaid je ne sais jamais) avant d'exploser :





... et la fameuse scène de l'ascenseur !!!




(ya un enfer spécial pour les doctorants qui ne parviennent pas à boucler leur thèse dans les temps ??)

samedi 10 octobre 2009

Le Club des Cinq sur les pas des Montreurs d'Ours : Chapitre 5

Chapitre V : L'inconnu de Lanes


Résumé des épisodes précédents : En vacances en Ariège, les Cinq découvrent la passionnante vie locale : les foins, les ours... De plus, les montagnes de la vallée ont la particularité intrigante de clignoter avec des lumières de lampes de poches le soir venu. Claude ne quitte pas Lanes des yeux car elle est incapable de profiter tranquillement des vacances. François est un ennuyeux rabat-joie passionné d'histoire, Mick a déjà pris un ou deux kilos depuis le début de cette histoire, et Annie a la phobie de... choses diverses et variées.


Et effectivement, le soleil du matin commençait à peine à éclairer les cimes des montagnes entourant le village d'Ercé que les Cinq, Dag y compris bien sûr, avaient déjà fini leur petit déjeuner. Ils patientèrent tant bien que mal jusqu'à neuf heures, pour ne pas arriver trop tôt chez Dimitri et son fils. Annie tenta bien de s'enfermer dans la salle de bains au dernier moment, prétextant qu'elle avait « besoin de se pomponner » mais Claude, à qui ces notions étaient étrangères et qui n'était même pas sûre de connaître la différence entre le shampoing et le savon, enfonça la porte et la tira par le bras tout au long du chemin.

La visite chez le montreur d'ours se révéla réellement passionnante. Il habitait un corps de ferme, à l'écart du village et sur les hauteurs. La vue était magnifique, on pouvait même voir le gîte. Les enfants apprirent tout ce qu'il était possible de savoir sur les impressionnants bestiaux qui vivaient presque dans la cour. Dimitri leur raconta l'histoire des « oussaillès », ces montreurs d'ours ariégeois du XIX° siècle qui quittèrent une montagne surpeuplée qui ne pouvait plus les nourrir, pour montrer leurs ours sur les routes d'Europe et, pour certains, jusqu'en Amérique. Il leur expliqua comment les oursons orphelins étaient recueillis, habitués à l'homme, puis comment on leur perçait les naseaux à l'adolescence pour y passer un anneau qui servirait à attacher l'indispensable corde. Annie poussa un cri d'indignation lorsqu'il leur décrivit cette mutilation, hélas nécessaire. Du coup, le petit Jean qui grommelait à l'écart du petit groupe se radoucit en présumant – par erreur – qu'elle partageait son affection pour ses animaux favoris. Ce fut lui alors qui termina la visite, soudain volubile, leur expliquant la différence de mœurs entre les ours sauvages et les deux spécimen qui vivaient avec eux. Ils purent même assister au repas des fauves !

Midi arriva bien vite, et les Cinq avaient passé une matinée instructive et passionnante. Ils avaient également le sentiment de s'être fait de nouveaux amis, en la personne du montreur d'ours et de son fils. Au moment de prendre congé, Claude eut une idée. Dimitri semblait connaître tellement bien la vallée ! Peut-être qu'il pourrait leur en dire un peu plus sur... Elle se décida :

- Pardon Monsieur, pouvez-vous nous dire comment s'appelle cette montagne, que l'on voit juste au-dessus ?

- Ah, celle-ci ? Il s'agit de Lanes, derrière le sommet de laquelle passe la frontière avec l'Espagne.

- Mais... Y a-t-il beaucoup de campeurs, là-haut ?

- Oh non, je ne pense pas. Vous pouvez aller vous promener au pied du sommet, la balade est jolie et pas trop difficile. De plus, il y a plein de buissons de myrtilles ! Au-dessus, la frontière est complètement inaccessible, défendue par des falaises rocheuses extrêmement dangereuses. Seules les chèvres osent s'y aventurer, et encore ! Mes ours n'iraient pas, eux...

Claude se dandinait d'un pied sur l'autre. Mais alors, d'où venait cette lumière, qu'ils avaient aperçue assez haut sur la montagne, quand ils avaient dormi à Fraguet ? Les cousins se regardèrent. Pouvaient-ils en parler au placide montreur d'ours ? Claude était partisane de garder ce secret pour eux et s'apprêtait à faire signe à ses cousins de se taire. Elle avait toujours tout voulu découvrir par elle-même, car c'était bien le propre de l'aventure ! Mais François, décidant de faire confiance à la sagesse de l'adulte, prit la parole et lui raconta tout. Dimitri prit un air grave, mais ce fut Jean qui répondit :

- Ce sont peut-être les contrebandiers !

- Les contrebandiers ? ! répéta Mick, stupéfait.

- Oui, Papa dit que la nuit ils franchissent la frontière espagnole et introduisent de la marchandise illégale et dangereuse en France. De l'alcool, des cigarettes... qu'ils revendent au marché noir !

- Au marché noir ?! répéta Annie, pas très rassurée.

- Au marché noir... répéta Claude, songeuse, une étincelle au coin des yeux.

Le montreur d'ours se méprit sur le ton de sa voix et lui tapota sur l'épaule d'un geste qui se voulait rassurant :

- Ces lumières peuvent très bien avoir une toute autre origine. Et même si les gendarmes ne parviennent pas à mettre fin à cet odieux trafic qui dure depuis des années, il y a peu de chances que vous tombiez sur eux, à moins que vous n'ayez envie de passer la nuit dans les cailloux au sommet de Lanes, à rechercher des malfaiteurs qui se ça se trouve ne passent même pas par là !

Et il partit d'un rire bonhomme, sans se douter qu'il venait d'évoquer aux yeux de Claude les vacances idéales... Les Cinq prirent congé non sans remercier chaleureusement l'homme pour son accueil. Ils promirent à petit Jean de revenir bientôt. Le silence de Claude sur le chemin du retour ne trompait personne. A tel point que François, l'aîné des quatre, anticipa :

- Claudine, il est hors de question que nous tentions de monter là-haut !

Sa cousine lui jeta un regard noir. Elle détestait qu'on l'appelle par son vrai prénom de fille. Mais elle avait visiblement autre chose en tête car elle se dérida rapidement (trop rapidement) et soupira :

- Je me rends bien compte que ce serait trop risqué, François ! Mais je ne comprends pas comment les contrebandiers, eux, parviennent à cheminer entre les falaises de rocher qui menacent à tout moment de s'écrouler !

- Tu as entendu ce qu'a dit Dimitri, objecta Mick. Il y a peu de chances que ce soient les lumières des contrebandiers que nous ayons aperçues l'autre nuit.

- Et que voulais-tu que ce soit ? lança Claude, rageuse. Des chauves-souris qui chassent les moustiques à la lampe de poche ?

- Claude... soupira doucement François qui avait vu Annie pâlir. Tu cherches vraiment la petite bête !

- Exactement ! Les ultra-sons de son radar à aventures sont bien plus perfectionnés que ceux des chauves-souris, sourit Mick pour détendre l'atmosphère.

Si sa boutade fit pouffer son frère et sa cousine, elle n'eut pas l'effet escompté sur Annie, qui gémit :

- Voulez-vous bien arrêter de parler de ces affreuses bestioles ?

Un éclat de rire général lui répondit.

- Bon, lança François, pris de pitié, pour changer de conversation. Que fait-on cet après-midi ?

Claude prit le bras de sa cousine et lui répondit, malicieusement, alors qu'ils arrivaient en vue du gîte :

- Je crois qu'une petite cueillette de myrtilles s'impose, hein Mick ?

Mick adorait littéralement les tartes aux myrtilles de Maria.

Et même si le repas ce midi-là en était dépourvu, il fut délicieux et les quatre enfants y firent honneur. Dagobert aussi, mais plus discrètement, car Oncle Henri refusait que sa fille le nourrisse à table. Claude devait alors redoubler de précaution et mettre en œuvre mille et une stratégies toutes plus ingénieuses et inventives les unes que les autres pour faire discrètement passer à son chien quelques (hum...) reliefs de nourriture. Parfois Maria s'étonnait que ce chien soit si gras alors qu'elle lui préparait chaque jour des gamelles de taille raisonnable et parfaitement équilibrées. Elle n'avait bien évidemment jamais fait part de cette réflexion à la fillette : la dernière personne qui ait dit que Dagobert aurait peut-être un peu de poids à perdre était son instituteur de maternelle à la première rentrée des classes et Claude ne lui avait plus jamais adressé la parole depuis lors.

Après le dessert, en avalant avec nostalgie sa dernière framboise à la crème tout en lorgnant sur l'assiette d'Annie qui n'avait pas encore fini les siennes, Mick évoqua l'idée qu'ils avaient eu d'aller cueillir des myrtilles sur Lanes. Tante Cécile s'inquiéta un peu, mais François lui assura d'une voix posée que Dimitri leur avait indiqué les coins les plus faciles d'accès et les mieux fournis. Ils obtinrent l'autorisation et, une fois la vaisselle expédiée, ils se mirent en route.

La montée ne fut pas aussi aisée que l'avait laissé entendre le montreur d'ours. Il avait grandi dans cette vallée, certainement était-il plus habitué qu'eux à gravir des pentes. Ou bien sa cuisinière était moins talentueuse que Maria... En chemin, les enfants rencontrèrent à nouveau le vieil éleveur et ses deux fils, qu'ils saluèrent familièrement et avec qui ils échangèrent quelques paroles de politesse. Les hommes de la montagne étaient toujours occupés à faucher les prés pour rentrer du foin en prévision de l'hiver. Mick était impressionné par la quantité de travail que ça représentait.

- Tu serais encore plus impressionné par la quantité de foin qu'une vache peut avaler en une journée, lui glissa Claude qui avait l'habitude de visiter les fermes de sa Bretagne natale.

Cette courte pause en compagnie d'Albert, Patrice et Joël fut la bienvenue, et les Cinq repartirent plus gaillardement à l'assaut de Lanes. Ils arrivèrent peu après en vue du fameux sommet rocheux. D'où ils étaient, il paraissait effectivement inaccessible. Claude regardait partout avec attention et poussa ses cousins à la suivre encore sur quelques mètres. Elle nourrissait peut-être le secret espoir de découvrir un chemin caché, ou une planque de marchandises volées ? Toujours est-il que même elle dut s'avouer vaincue, lorsque l'ascension s'avéra trop dangereuse pour être poursuivie. Annie avait déjà dérapé par deux fois sur les graviers et elle s'était un peu tordu la cheville.

De dépit, les quatre enfants se rabattirent avec une férocité sauvage sur les buissons de myrtilles, dont l'abondance même était un défi à l'estomac de Mick. Le plus discrètement possible, ce dernier en avalait d'ailleurs beaucoup plus qu'il n'en mettait dans les pots qu'Annie avait pris soin d'emporter à cet effet. Tout à son bonheur d'être en balade avec ses petits maîtres, Dagobert, à défaut de lapins qui ne vivaient pas à ces altitudes, courait après les papillons. Petit à petit, il s'enhardissait et s'éloignait de Claude sans que celle-ci s'en aperçoive. Ayant remarqué le manège de son cousin, elle était bien trop occupée à surveiller son appétit vorace qui risquait de compromettre le dessert de ce soir.

Soudain, un aboiement lointain, trop lointain, fit sursauter la fillette. Elle redressa la tête vivement mais n'aperçut son chien nulle part. Arrachant Mick à l'idée qu'il se faisait du paradis, allongé de tout son long entre des buissons particulièrement bien chargés, elle appela :

- Dag ! Ici ! Dago ! Où es-tu ?

D'autres aboiements lui répondirent, de derrière un piton rocheux à une cinquantaine de mètres d'eux. Les enfants se précipitèrent aussi vite que le sol inégal et caillouteux le leur permettait. Avant qu'ils aient pu en faire le tour, ils entendirent à leur plus grande horreur Dagobert émettre un gémissement plaintif. Claude accéléra en dépit du risque de s'étaler sur les pierres coupantes, dépassant ses cousins. Toute à son inquiétude, elle faillit rentrer dans un homme qui descendait à grands pas de la montagne rocheuse, son pied sûr et sa démarche rapide indiquant qu'il connaissait certainement le chemin. Hors d'elle, la fillette cria bille en tête :

- Qu'avez-vous fait à mon chien ?

L'homme était grand, basané. Claude devait lever la tête pour apercevoir son visage, d'ailleurs habilement dissimulé. Il avait un chapeau sombre qui lui descendait sur les yeux et le col de sa cape remonté. Ses vêtements, solides et pratiques, étaient usés, et il avait de grosses chaussures de marche, ainsi qu'un lourd bâton à la main. Ses yeux noirs dans lesquels brilla un instant un éclair de menace s'accrochèrent quelques secondes à ceux, bleus, de l'enfant, puis il haussa les épaules et continua son chemin, bousculant sans ménagement François qui était sur sa route. Claude ne prit même pas la peine de s'indigner. Elle se précipita vers son chien, qui était resté à distance raisonnable du mystérieux inconnu. Elle fut soulagée, ainsi que ses cousins qui arrivèrent après elle auprès du brave animal, de constater qu'il semblait aller bien. Il n'avait qu'une petite éraflure sur le flanc. Nonobstant, Claude décréta qu'il fallait d'urgence le descendre chez le vétérinaire et fit mine de vouloir porter Dagobert. Cela fit à peine sourire les autres, encore impressionnés par leur rencontre avec l'homme ténébreux aux yeux si froids. L'heure et l'humeur n'étant plus à la cueillette, ils redescendirent en silence.

jeudi 8 octobre 2009

Memo perso


Demander à un artiste -n'importe lequel- de composer une chanson ayant pour titre L'Eté indien, pour éviter d'avoir le sirop de Joe Dassin collé à la gueule toute la journée après les prévisions météorologiques du matin.

dimanche 4 octobre 2009

Le Club des Cinq sur les pas des Montreurs d'Ours : Chapitre 4

Chapitre IV : la fabuleuse protection de l'Eglise par les ours




Résumé des épisodes précédents : Le Club des Cinq est en vacances en Ariège. Ils ont déjà entrepris de fouiner partout et de faire connaissance avec des personnages couleur locale qui leur seront utiles dans la suite de l'aventure (les fils de l'éleveur et dans ce chapitre le montreur d'ours et son insupportable gamin). Pour l'instant, l'aventure se résume à des lumières bizarres apparues sur Lanes, mais Claude est sur les dents.


Ce furent des murmures qui éveillèrent la fillette au petit matin. Encore endormie, elle se demanda un moment où elle était. Le soleil, plus matinal qu'elle, dardait ses rayons par le fenestrou. Les murmures s'intensifièrent.

- Rends-moi cette couverture !

- Grmbl... laisse-moi dormir...

- Va-t-en de mon matelas, ou je te jette au bas de la pente, Mick !

- Hum...

Mick ! Annie s'éveilla soudain tout à fait. Elle était avec ses frères et sa cousine et ils avaient passé la nuit à Fraguet, sans se faire attaquer par les ours... Ni par les chauves-souris, d'ailleurs ! se dit-elle lorsqu'elle aperçut les petits mammifères tranquillement pendus au-dessus d'elle aux poutres de la cabane. Au cri d'effroi qu'elle poussa, les autres se réveillèrent complètement à leur tour. Claude jetait des regards furieux à son cousin, dont la tête brune émergeait à peine d'un tas gigantesque de couvertures en bataille. François fut debout en clin d'œil, le corps en alerte, jetant des regards partout et tendant les bras pour protéger sa petite sœur :

- Annie ! Tout va bien ?

Cette dernière, réfugiée au fond de son duvet, tendit sans répondre un doigt tremblant vers la cause de sa frayeur. Mick se redressa soudainement, jetant du même geste ses couvertures sur la tête de sa cousine. Il adorait les chauves-souris.

Eclatant de rire pour chasser le ridicule de son remake de Prince Vaillant, François entrepris de faire descendre Annie de l'étage sans déranger le sommeil des inoffensives petites bêtes. Ce rôle de protecteur lui allait comme un gant, si vous voulez son opinion. Mick entreprit d'expliquer à Claude les mœurs nocturnes de ses animaux favoris, et combien elles étaient utiles dans la lutte contre les insectes nuisibles, mais le regard plus que furibond que lui jetèrent les deux yeux cernés de sa cousine le poussa à battre en retraite lui aussi au bas de l'échelle. Après tout, c'était l'heure du petit-déjeuner et il était connu pour son appétit, non ? Annie préparait déjà le café, tandis que François installait une table dehors, à l'aide d'une grande pierre plate et de plus petits cailloux.

Quand le café fut servi, les enfants s'assirent à même le pré, pour manger en silence, impressionnés par le panorama grandiose qui s'étalait à leurs pieds. Cependant, le regard de Claude s'égarait souvent en direction de Lanes, la montagne où ils avaient aperçu les lumières la veille au soir. Elle s'adressa machinalement à son chien, couché près des enfants et qui attendait patiemment que l'un d'eux lui jette quelques miettes. C'est que la montagne, ça creuse.

- Je suis intriguée, Dag. Cette montagne mériterait une petite randonnée, qu'en dis-tu ?

- Lui, je ne sais pas, repris sévèrement François, mais nous je te rappelle qu'aujourd'hui nous accompagnons Oncle Henri et Tante Cécile à Massat, pour la reconstitution historique de la défense de l'Eglise par les ours.

Au mot « historique » Mick fit la grimace. Claude, elle, tiqua plutôt sur la mention « d'accompagner Oncle Henri ». Annie, enfin, frissonna lorsqu'il fut question d'ours. La journée s'annonçait pleine de promesses pour les Cinq !

Pendant que Claude courait après Dago qui semblait avoir pris au pied de la lettre cette idée d'escapade dans la montagne, Mick et François rangèrent les duvets et les couvertures dans les sacs. Annie s'appliquait pour laisser la cabane dans l'état où ils l'avaient trouvée, et même encore plus propre. La petite fille avait une âme de ménagère.

Lorsqu'ils arrivèrent au gîte (en courant car il est tellement agréable d'aller vite en descente !) les parents de Claude étaient prêts à partir. Une rapide toilette pour les enfants, et les voilà tous dans le break d'Oncle Henri, à l'assaut de la petite route de montagne qui menait à Massat par le col du Saraillé. François, excité, révisait à voix haute ses leçons sur l'histoire constitutionnelle de la France. Tante Cécile avait tendance à être malade en voiture et la proximité du précipice ne la rassurait pas. Elle chantait à mi-voix « Combien pour ce petit chien dans la vitrine ? » en boucle de manière compulsive pour combattre à la fois son mal de cœur et l'angoisse qui l'étreignait à chaque virage. Dagobert, croyant qu'on parlait de lui, ponctuait poliment la mélodie de brefs aboiement. Claude et Mick se jetaient sur la vitre du côté du ravin dès qu'ils pouvaient en hurlant de joie. Henri Dorsel klaxonnait consciencieusement dans les virages. Les Ariégeois qu'il croisait n'avaient apparemment pas encore compris le fonctionnement d'une boîte de vitesse... voire même de la pédale de frein... Bref, Annie fut soulagée d'arriver enfin en vue du petit village. Ils garèrent la voiture et descendirent rapidement se mêler à la foule des curieux ou des touristes. L'aspect de l'ancien village avait été reconstitué pour l'occasion, et les habitants avaient revêtu les costumes d'autrefois. On notait ainsi un homme habillé d'une soutane noire, perché sur un tonneau près de la porte de la petite église, qui haranguait la foule. Attirée par le bagout du gaillard, la famille s'en approcha pour l'écouter. L'homme déguisé en curé expliquait le fait historique à l'origine de cette reconstitution.

- En 1905, la III° République vota, à Paris, la séparation de l'Eglise et de l'Etat. La République Française, dans sa volonté d'uniformisation, demanda l'application de cette mesure sur tout le territoire.

François, qui connaissait bien cette période de l'Histoire, ne pouvait résister au plaisir de se pencher à l'oreille de son frère pour lui donner quelques précisions supplémentaires. Mais Mick, l'esprit ailleurs, ne l'écoutait que d'une oreille et manifestement François n'avait pas choisi la bonne. Le faux curé continuait :

- Mais cette église derrière moi, ce sont les gens de cette vallée qui l'ont payée et faite construire ! Ils y étaient attachés, comme à leurs propres maisons ! Alors lorsque la Garde Républicaine est arrivée pour faire l'inventaire des biens du clergé, conformément à la loi votée dans la capitale, tous les habitants du village se massèrent devant l'église pour défendre leurs biens !

Il fit une savante pause, promenant son regard sur l'assemblée suspendue à ses lèvres, avant de poursuivre :

- Et pour interdire l'accès de l'église aux gendarmes, ils avaient même amené... leurs ours !

L'oeil jusque-là un peu vitreux de Mick s'alluma. Claude saisit fermement le collier de son chien qui s'était mis à gronder. Annie se réfugia dans les bras de son oncle. Deux ours remontaient l'allée en direction de l'église, protégés de la foule (à moins que ce ne soit l'inverse...) par un cordon de sécurité et des habitants déguisés. Ils marchaient à quatre pattes l'un derrière l'autre, menés par des longes que tiraient un homme et un petit garçon. La ressemblance entre eux était trop frappante pour qu'il ne s'agisse pas d'un père et de son fils. L'ours que l'homme tirait lui arrivait aux coudes, bien qu'il ne fut pas spécialement petit. Le pelage de la bête, bien entretenu, était d'un marron clair très doux et par son épaisseur en rajoutait encore à la stature imposante de l'animal. Sa tête était plutôt sympathique, mais il avait la fâcheuse de manie de découvrir ses crocs à intervalles réguliers, ce qui faisait frissonner la foule. En revanche, la petite boule de poils récalcitrante que le garçon, marchant derrière son père, tentait de faire avancer, même Claude ne pouvait s'empêcher de la trouver simplement... adorable. Dago, réfugié entre les jambes de sa maîtresse, regardait le spectacle la gueule ouverte d'un air d'incrédulité totale qui ne seyait pas parfaitement avec sa dignité.

Devant la porte de l'église, l'homme en soutane continuait sa harangue, se gardant bien de descendre de son tonneau. Le montreur d'ours, qui apprit-on s'appelait Dimitri, fit se dresser son ours à plusieurs reprises sur ses pattes arrière pour faire semblant d'effrayer des villageois déguisés en gendarmes. A chaque fois la foule reculait de plusieurs pas dans un ensemble parfait. Les sévères pandores semblaient avoir du mal à contrôler le sourire qui pointait sous leurs moustaches. Le minuscule ourson tenta soudain de faire de même et lança gauchement ses pattes avant vers le ciel. Malheureusement, il perdit l'équilibre et s'étala maladroitement, ses deux pattes avant écartées de chaque côté et... les fesses en l'air. Même Annie, plutôt morte que vive à cause de la frayeur que lui causait le grand fauve, consentit un sourire. Qui s'élargit lorsqu'elle vit l'ourson, visiblement vexé d'avoir raté sa tentative, se réfugier contre le flanc du monstre, le nez caché dans ses poils.

- C'est une ourse et son ourson ! s'écria la petite fille.

Mais le spectacle était déjà fini et les deux montreurs d'ours disparurent avec leurs bêtes. Les Cinq se mirent à commenter le magnifique spectacle qu'ils avaient vu. Prudement Mick s'éloigna de son frère qui se tourna alors vers son oncle pour échanger des considérations historiques. Claude tapotait l'échine de Dagobert, toujours figé, la gueule ouverte. C'est alors que le petit garçon à l'ourson réapparut, sans son ourson. Il se planta devant Annie, ses deux poings sur ses hanches :

- Non ! Ce n'est pas son ourson !

- Pardon ?? demanda la petite fille après avoir sursauté.

- On ne peut pas approcher une ourse quand elle est avec son petit.

- Je... je ne savais pas, désolée... Annie ne put s'empêcher de sourire devant l'air furibond du garçon qui devait être à peine plus jeune qu'elle.

- C'est un ourson, c'est moi qui l'ai recueilli quand sa maman est morte dans la montagne. Tu ne sais rien, tu es stupide ! Je lui ai donné le biberon et il s'appelle Miel.

- Mais enfin... balbutia Annie qui ne savait plus où se mettre.

Heureusement, Dimitri s'approcha derrière son fils.

- Jean ! Veux-tu être poli ! Excusez-le, petite mademoiselle, il est un peu sauvage, et je crois qu'il a tendance à oublier que tous les enfants n'ont pas été élevés avec des ours...

Les Cinq partirent d'un éclat de rire. Le père, avec son sourire bienveillant, était bien plus sympathique que le fils !

- Voulez-vous passer chez nous demain matin, pour visiter la réserve ? Jean se fera un plaisir de vous expliquer comment vivent les animaux sauvages...

François, Mick et Claude jetèrent un regard implorant à Tante Cécile pour quémander l'autorisation. Annie leur jeta le même regard, mais ce n'est pas sûr que ce soit pour les mêmes raisons... Tante Cécile acquiesa dans un sourire. Les cousins poussèrent un cri de joie et s'empressèrent d'accepter l'invitation. Dimitri leur expliqua alors où était située leur maison, un peu à l'écart du village d'Ercé, et il partit entraînant son fils qui fusillait encore la pauvre Annie du regard. Claude fit observer :

- Tu t'es fait un ami, chère cousine !

- Je suis sûre que son ourson est plus gentil que lui ! frissonna Annie.

- Allons, la raisonna François, il est certainement plus habitué à la compagnie des bêtes que des hommes...

- Oui, glissa Mick, malicieux... comme Claude !

Ce qui lui valut une bourrade bien sentie de sa cousine. En riant, la petite famille se dirigea vers la voiture pour rentrer en gîte. Que le temps allait leur sembler long jusqu'au lendemain !



samedi 3 octobre 2009

Les 100 livres les plus lus par les Français...


Je me demande qui a dressé cette liste, que je retrouve ici ou là sur les blogs littéraires...

Bref, voici les 100 livres les plus lus par les Français. Le principe du "tag" (car c'en est un) est simplement de marquer les livres que l'on a lu.

J'ai pas été tagguée, mais qu'importe ! je m'auto-taggue. C'est ça l'anarchie.



1 La Bible


2 Les misérables de Victor Hugo


3 Le petit prince d'Antoine de Saint-Exupéry


4 Germinal d'Emile Zola


5 Le seigneur des anneaux de J.R.R. Tolkien


6 Le rouge et le noir de Stendhal


7 Le grand Meaulnes d'Alain-Fournier


8 Vingt mille lieues sous les mers de Jules Verne


9 Jamais sans ma fille de Betty Mahmoody


10 Les trois mousquetaires d'Alexandre Dumas


11 La gloire de mon père de Marcel Pagnol


12 Le journal d'Anne Frank d'Anne Frank


13 La bicyclette bleue de Régine Deforges


14 La nuit des temps de René Barjavel


15 Les oiseaux se cachent pour mourir de Colleen Mc Cullough


16 Dix petits nègres d'Agatha Christie


17 Sans famille d'Hector Malot


18 Les albums de Tintin de Hergé


19 Autant en emporte le vent de Margaret Mitchell


20 L'assommoir d'Emile Zola


21 Jane Eyre de Charlotte Brontë


22 Dictionnaires Petit Robert, Larousse, etc.


23 Au nom de tous les miens de Martin Gray


24 Le comte de Monte-Cristo d'Alexandre Dumas


25 La cité de la joie de Dominique Lapierre


26 Le meilleur des mondes d'Aldous Huxley


27 La peste d'Albert Camus


28 Dune de Frank Herbert


29 L'herbe bleue Anonyme


30 L'étranger d'Albert Camus


31 L'écume des jours de Boris Vian


32 Paroles de Jacques Prévert


33 L'alchimiste de Paulo Coelho


34 Les fables de Jean de La Fontaine


35 Le parfum de Patrick Süskind


36 Les fleurs du mal de Charles Baudelaire


37 Vipère au poing d'Hervé Bazin


38 Belle du seigneur d'Albert Cohen


39 Le lion de Joseph Kessel


40 Huis clos de Jean-Paul Sartre


41 Candide de Voltaire


42 Antigone de Jean Anouilh


43 Les lettres de mon moulin d'Alphonse Daudet


44 Premier de cordée de Roger Frison-Roche


45 Si c'est un homme de Primo Levi


46 Les malheurs de Sophie de la comtesse de Ségur

47 Le tour du monde en 80 jours de Jules Verne


48 Les fourmis de Bernard Werber


49 La condition humaine d'André Malraux


50 Les Rougon-Macquart d'Emile Zola


51 Les rois maudits de Maurice Druon


52 Cyrano de Bergerac d'Edmond Rostand


53 Les hauts de Hurlevent d'Emily Brontë


54 Madame Bovary de Gustave Flaubert


55 Les raisins de la colère de John Steinbeck


56 Le château de ma mère de Marcel Pagnol


57 Voyage au centre de la Terre de Jules Verne


58 La mère de Pearl Buck


59 Le pull-over rouge de Gilles Perrault


60 Mémoires de guerre de Charles de Gaulle


61 Des grives aux loups de Claude Michelet

62 Le fléau de Stephen King


63 Nana d'Emile Zola


64 Les petites filles modèles de la comtesse de Ségur

65 Pour qui sonne le glas d'Ernest Hemingway


66 Cent ans de solitude de Gabriel García Márquez


67 Oscar et la dame rose d'Eric-Emmanuel Schmitt


68 Robinson Crusoé de Daniel Defoe


69 L'île mystérieuse de Jules Verne


70 La chartreuse de Parme de Stendhal


71 1984 de George Orwell


72 Croc-Blanc de Jack London


73 Regain de Jean Giono


74 Notre-Dame de Paris de Victor Hugo


75 Et si c'était vrai de Marc Levy


76 Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline


77 Racines d'Alex Haley


78 Le père Goriot d'Honoré de Balzac


79 Au bonheur des dames d'Emile Zola


80 La terre d'Emile Zola


81 La nausée de Jean-Paul Sartre


82 Fondation d'Isaac Asimov


83 Le vieil homme et la mer d'Ernest Hemingway


84 Louisiane de Maurice Denuzière


85 Bonjour tristesse de Françoise Sagan


86 Le club des cinq d'Enid Blyton


87 Vent d'est, vent d'ouest de Pearl Buck


88 Le deuxième sexe de Simone de Beauvoir


89 Les cavaliers de Joseph Kessel


90 Jalna de Mazo de la Roche


91 J'irai cracher sur vos tombes de Boris Vian


92 Bel-Ami de Guy de Maupassant

93 Un sac de billes de Joseph Joffo


94 Le pavillon des cancéreux d'Alexandre Soljenitsyne


95 Le désert des Tartares de Dino Buzzati


96 Les enfants de la terre de Jean M. Auel


97 La 25e heure de Virgil Gheorghiu


98 La case de l'oncle Tom de H. Beecher-Stowe


99 Les Thibault de Roger Martin du Gard


100 le silence de la mer de Vercors


54 livres lus sur 100, c'est pas trop mal... Je m'estime bonne Française !
Cela dit, il me reste des doutes...
Numéro 22 : les dictionnaires ! J'ai marqué "lus", mais bon...
En revanche, numéro 50 : les Rougon-Maquart, j'en ai peut-être lus un ou deux mais certainement pas l'ensemble de la saga...

Et puis par exemple, quand on dit "Dune" ou "Fondation", le fait que je les ai lus plusieurs fois, et leurs suites et leurs éventuelles préquelles, ça pourrait me rapporter des points, non ??

Je suis étonnée et fière que des livres de SF/Fantasy se retrouvent dans cette liste : Le Seigneur des Anneaux bien sûr (et bien placé !), Dune ok peut-être, mais Fondation ! (Et je ne parle pas du Meilleur des Monde, on a tous dû le lire en terminale pour nos disserts de philo ou nos révoltes adolescentes contre la Société)

Dans la série "Mais qu'est-ce que ça fout dans cette liste", je pointe le numéro 59 Le Pull-over rouge, que je n'imaginais pas si lu. Les larmes que j'ai versées à la fin de ma lecture sont les seules dont je me souvienne pour un livre. Numéro 88 : Le Deuxième sexe, qui est le seul essai de la liste si je ne me trompe et qui est quand même un pavé indigeste dans son genre.

(Et vous avez noté, le numéro 86 ???)

Comme toutes les listes, elle me pousse au péché... cette vieille tentation de systématicité qui me pourrit un peu l'existence. L'envie d'être complète, exhaustive ! Pourquoi pas se mettre à lire tous les livres non-lus de cette liste et pondre un petit billet pour ce blog ?
Je me demandais... quelqu'un est intéressé par relever ce challenge avec moi ?