vendredi 23 janvier 2009

Génération


Existe-t-il concept plus galvaudé ?

En dépit des efforts de Mannheim, de Mead, on dilue le concept, on l'use, on le critique pour mieux l'employer (c'est à dire à tort et à travers) et au final que reste-t-il ? Une pauvre thésarde qui tente de se dépatouiller avec tout ça.

Le XX° siècle, celui où l'histoire s'est "accélérée", compte des générations en veux tu en voilà, et sers-toi avant que ça parte à la poubelle :
Vous êtes nés aux alentour de 1885 ? Vous faites partie de la génération "Belle époque".
Entre 1915 et 1924 ? La génération "Krach" (ça pète, comme nom)
1925-1934 ? La génération "Libération"
Entre 1935 et 1944 ? La génération "Algérie".
Entre 1945 et 1954 ? La génération "Mai 68", bien sûr...
1965-1964 ? La génération "Crise" (oh la honte, comment ça craint)
Et 1975-1984 ? La génération "Internet"...

Liste non-exhaustive, bien sûr !
On a tous entendu parler de la génération Mitterrand, la génération Années folles, génération MP3, 2.0, et puis toutes les guerres, et puis toutes les pannes d'inspiration de journalistes débiles qui cherchent une accroche pour faciliter l'écoute à l'auditeur qu'ils imaginent plus débile qu'eux...
Je me souviens d'une campagne d'affichage pour une banque en ligne qui proclamait l'avènement de la "No paperasse generation". En américain dans le texte, c'est plus fun.
Ca me fatigue, tout ça...
(Et puis si vous êtes né entre ces dates, poussez-vous du chemin de la sociologie, vous gênez, poussières...)

Mais c'est le concept même de génération qui prête le flanc à tous ces dérapages. Reprenons Mannheim : que dit-il, finalement, dans Le Problème des générations ? (publié en 1929 - soit génération Libération, arf !). Il relie la génération à l'histoire. A l'Histoire. Pour faire partie d'une génération, il faut avoir vécu, ensemble, vers le même âge (à partir de 17 ans et jusqu'à l'âge adulte, cet âge où l'on s'éveille au monde et où l'on fait des choix de vie), un événement ou une période marquants.
Point. Le sociologue allemand s'est ensuite drapé dans sa philosophie et nous a laissé avec ça sur les bras : débrouillez-vous pour en faire un concept sérieux et opératoire !
Et sur ce - je résume - les marxistes s'en sont mêlés : oui mais, les classes sociales, et alors ? On ne peut pas dire que l'on est marqué de la même manière si on fait partie de la haute ou si on patauge dans la rigole entre les pavés, quand même, si ?
Manheim n'a rien répondu, il était occupé à enseigner la philosophie à Londres.

Du coup, je suis bien emmerdée...

7 commentaires:

Zacharias Galouzeau de Moussaoui a dit…

Tu oublies la génération méga octet (à voir sur dailymotion).

Meme Karl Popper en a dit "ca swingue grave".

Anonyme a dit…

Et la génération Y...

Anonyme a dit…

et la dé-génération ?

louise miches a dit…

Allez-y, riez de mon malheur... Enfoncez le douloureux clou de la mystérieuse et changeante sociologie dans mon tendre flanc d'apprentie historienne consciencieuse...

Une génération de dégénérés ? Promis, Mylène, je me penche sur le sujet , et serai bientôt en mesure de proposer des dates.
(-3 million - 2009 ?)

Zacharias Galouzeau de Moussaoui a dit…

Oh non, je crois au contraire qu'on a parfaitement illustré ton propos.

louise miches a dit…

Eh oui, c'est bien le problème...

Anonyme a dit…

Il existe aussi l'époque de la re-génération (dixit un documentaire très sérieux et parfaitement racoleur dans la fabuleuse émission 66 minutes de M6) ou l'on nous exposais les possibilités de régénération de tissus cellulaires par l'injection de cellules souches préalablement piquées dans la moelle épinière du patient. On en a pas fini de générer ! L'utilisation de ces codes perdureront tant que l'humanité perdurera.

Et si les dégénérés venait étaient capable de se régénérer ?