samedi 20 février 2010

L'enfer, le Livre de Poche et Chicago

Un titre inspiré d'un "bon mot" qui m'a fait sourire et que je recopie plus bas, qui résume bien la lecture de Jack London, Le Talon de fer (en 10/18, certes...).
Ce roman, lu dans le cadre de ma curiosité pour le genre dit des "utopies écrites", suinte le communisme mal dégrossi, très très mal dégrossi, ce qui le sauve finalement, lui donnant un petit cachet kitsch qui parvient parfois à être charmant.
Le livre se présente sous la forme d'un manuscrit, écrit par Avis Cunningham, une jeune femme bourgeoise qui a épousé un fil du peuple, un chef de la Cause, l'énigmatique et fascinant Ernest Everhard. Un nom plein de promesses, mais ce n'est pas un roman à galipettes (hélas, il aurait bien gagné en légerté) ! Ce manuscrit, écrit en 1912 (la publication du Talon de fer remonte à 1907, nous nous trouvons donc dans le cas d'un roman d'anticipation), est censé avoir été retrouvé en 2368, dans la grotte où Avis s'était réfugiée avant son arrestation.
Car la dame, et d'autres, sont pris dans les remous politiques de leur époque, et vivent notamment la "Commune de Chicago", les pages les plus fortes du bouquin, selon Trotski à qui la fille de Jack London l'avait envoyé. Des notes de bas de page, d'éditeurs ou d'historiens fictifs, renforcent cette impression de manuscrit retrouvé et livré brut, qui se finit d'ailleurs au beau milieu d'une phrase.
Hélas, le style est pénible à lire, les personnages, et surtout celui d'Avis, sont à la limite de l'horripilant, et ce vieux vocabulaire communiste m'a fatigué à plusieurs reprises. Car le Talon de fer, qu'est-ce ? C'est l'immense coalition des riches, des médias et des curés, qui bien entendu, intentionnellement, musellent et font disparaître l'opposition.
Croyez-moi, ma sympathie naturelle ne va pas à cette oligarchie, mais après avoir lu le livre, je pourrais bien virer ma cuti. J'ai frémi plutôt pour le "Peuple de l'abîme", ce lumpen-prolétariat qui se fait massacrer par vagues entières par l'armée à Chicago. Hélas il n'a pas, lui, la sympathie de l'auteur (Avis ou Jack London ?), et est décrit, quoiqu'avec tendresse, comme un troupeau abruti par le travail, la misère et l'alcool et qui ne saurait pas reconnaître un traître si on lui en mettait un sous le nez.
Bref, une curiosité littéraire plus qu'un coup de coeur de lecture...
Et le bon mot, et la citation ? me réclament ceux qui suivent, eh bien voilà :

Note de bas de page 388 :

Chicago était le pandémonium industriel du XIX° siècle. Une curieuse anecdote nous vient de John Burns, grand chef travailliste anglais, qui fut un instant membre du Cabinet. Il visitait les Etats-Unis lorsque, à Chicago, un journaliste lui demanda ce qu'il pensait de cette ville : "Chicago ! répondit-il, c'est une édition de poche de l'enfer." Quelques temps après, au moment où il prenait le bateau pour retourner en Angleterre, un autre reporter l'aborda pour lui demander s'il avait modifié son opinion sur Chicago : "Oui certes ! répondit John Burns. Mon opinion actuelle est que l'enfer est une édition de poche de Chicago."

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