lundi 11 octobre 2010

Pourquoi les feuilles changent-elles de couleur en automne ?

Ce lundi, je participe au défi bottérien de Maxoo, qui nous propose une question à laquelle le blogueur doit fournir deux réponses. La réponse du savant, et celle du poète. J'ai choisi de mettre en scène un jeune homme, Emile (évidement...), qui tente de faire son éducation entre deux maîtres aussi fantasques l'un que l'autre, quoi que dans un style très différent...


Aujourd'hui Emile voudrait savoir pourquoi les feuilles des arbres changent de couleur en automne.

(Le Savant remonte ses lunettes sur son nez, s'assoit en soupirant devant Emile et le fixe, se demandant visiblement comment expliquer un phénomène aussi complexe à un esprit aussi simple) : "Tout, ici encore, est affaire de relativité. Te souviens-tu, mon jeune ami, de E=MC² ? Einstein, n'oublie jamais Einstein ! Bref, le vert des feuilles est dû à la chlorophylle contenue dans celles-ci. Or la chlorophylle est un assemblage de trois molécules d'aluminium qui tournent autour d'un photon de lumière verte. Bien, jusqu'ici, tu suis ? Or donc, si tu te rappelles de nos leçons d'astronomie, tu sais que les saisons sont dues à l'inclinaison de la Terre sur son axe, qui lui fait adopter au cours de sa Révolution une exposition différente à la lumière du soleil. Tous les ans, vers septembre-octobre, les rayons du soleil frappent notre petit coin de Terre selon un axe très spécial, appelé automnus photonum, et qui... 
P-H. Photonum, commence par un P et un H. Heureusement que je suis là pour surveiller ta prise de notes..." (Emile se gratte le nez d'un air désolé) 
"Bref, l'angle des rayons du soleil du début de l'automne frappe le photon de la chlorophylle de plein fouet et ce dernier se rétracte à l'intérieur de l'arbre, puis dans la terre. L'aluminium, comme tu le sais, étant le métal le plus lourd, il attire le photon jusqu'au centre de la Terre (la gravité, Emile, la gravité !). Et là le photon reprend le relais, car comme mes recherches personnelles l'ont brillament démontré "la lumière appelle la lumière" comme j'aime dire..." (Le Savant ménage une pause, pour voir l'effet que fait son théorême sur son jeune élève. Ce dernier reste impassible. Le Savant reprend, un peu plus sèchement.)
"Et donc le photon aspire à retrouver les rayons du soleil, mais les rayons les plus compatibles avec sa nature atomique, ceux du printemps. Il traverse donc la Terre dans l'autre sens et refait surface à l'intérieur des arbres et des plantes à notre exact opposé géographique du noyau terrestre, et là-bas, c'est le printemps. Ce sera tout pour aujourd'hui, Emile."
(Le Savant ouvre un livre délibérément énorme et poussiéreux et chasse l'Emile d'un revers de la main.)

Très satisfait de cette réponse dûment notée dans son carnet (bien que très honnêtement il n'ait rien compris), Emile, par acquit de conscience, part à la recherche de son deuxième maître, le Poète. Il le trouve au jardin, couché parmi les branches d'un saule pleureur. Justement c'est le début de l'automne, le vent souffle qui ne parvient pas à arracher les feuilles encore trop vertes des arbres du jardin. Emile répète sa question et le Poète lui sourit.
Il fit signe à son élève de s'allonger auprès de lui et réajustant ses bras croisés derrière sa tête, le Poète expliqua : 
"C'est une courtoisie que nous fait Dame Nature, espiègle toujours pourtant en son grand âge. A chaque équinoxe, elle fait semblant de mourir... Et nous, pauvres fous pauvres poètes, la suivons dans son délire et nous lamentons et cherchons, et cherchons, ce beau vert tendre couleur d'espoir. Rien ne vient, et la Nature rit bien, bien cachée sous son manteau de neige qui ne tarde à s'installer. Nous écrivons alors des vers déchirants, la nostalgie au bout de la plume et nous préparons à dépérir au coeur de l'hiver..." (Emile est bouche béée, appuyé sur un coude et ne quittant pas le Poète du regard. Ce dernier écarte une branche de saule qui lui chatouille les narines d'une puissante expiration) 
"Et c'est alors que tout espoir est mort que cette coquine réapparait, au détour d'un sentier, sous une feuille morte, bourgeonnante, prometteuse et bientôt verte ! Et à chaque année la même honte : nous avions marché ! nous y avions cru ! Mais tout au bonheur de retrouver le printemps, nous ne lui en voulons pas, nous poètes, mais nous sautillons et nous galopons dans cette couleur adorée retrouvée..."
(Il conclut sa tirade par un soupir. Emile, consciencieux, note quelques phrases qui lui semblaient bien tournées et dont son maître aura peut-être besoin pour une de ses futures oeuvres. Le Poète ferma les yeux et murmura :)
"Accepte ce que t'offre la Nature, Emile, de la couleur des feuilles au bruit des nuages, et ne cherche jamais le pourquoi du comment. A la rigueur, invente-le."
(Et plus rien. Le Poète s'était endormi. L'Emile s'éloigna sur la pointe des pieds, pour méditer sur sa leçon du lundi.)

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